Pour le respect de la parole donnée #FaisonsLesComptes

22 décembre 2016

Pour le respect de la parole donnée #FaisonsLesComptes

J’espère me tromper mais depuis le 16 décembre dernier j’ai bien cette mauvaise impression que le gouvernement togolais repousse délibérément les limites du vice et de l’immoralité politique. A cette date le gouvernement réuni en conseil des ministres sous la houlette du chef de l’Etat adoptait un décret portant création de comités ad hoc de supervision, de gestion et de mobilisation de fonds pour soutenir les éperviers à la CAN 2017. Si le gouvernement a cru ainsi bien faire, c’est plutôt raté. Nous sommes carrément en présence d’un scandale-en attendant de trouver un mot plus fort-dès lors que ce décret intervient au moment où nous attendons toujours de connaitre les comptes de la CAN 2013.

J’ai encore à l’esprit des souvenirs frais. A l’approche de la CAN 2013 le gouvernement prenait prétexte d’un climat délétère au sein de la Fédération Togolaise de Football pour instituer par décret ces comités placés sous la supervision du premier ministre. Ils étaient chargés de mobiliser auprès des contribuables les fonds nécessaires pour un soutien financier de l’équipe nationale à la CAN. On nous a déballé autant d’arguments mielleux que possible pour nous persuader du sérieux de ces comités et nous inciter à donner des sous. Nous avons contribué volontiers, subi l’augmentation du prix du ciment, du carburant  et autres produits pour récolter à la clé un match en quarts de finale suivi d’une fin de séjour humiliante et chaotique des joueurs en Afrique du sud. Aujourd’hui les fameux comités se murent dans le silence et ça fait trois ans que ça dure.

Quid de la parole donnée ?

A force de m’informer, en fidèle auditeur, via la radio je me suis accommodé du générique plutôt insolite d’une émission hebdomadaire. Un générique qui met à nu toute la duplicité du gouvernement en martelant certains propos que tenait le premier ministre Ahoomey-Zunu en 2013 :

« Je tiens à rassurer les togolais que nous rendrons compte dans les détails de ce qui a été utilisé. Et si quelqu’un garde un franc par devers lui il le rendra jusqu’au dernier centime.. ».

Depuis lors l’eau a coulé sous les ponts. Le premier ministre a passé le témoin sans avoir honoré sa promesse. Face à l’inaction du gouvernement la déception ressentie est à la hauteur du ton solennel de l’engagement pris devant le Togo tout entier.  Nos gouvernants semblent ignorer qu’il y a des exigences élémentaires sur lesquelles on ne peut transiger sans perdre la confiance des citoyens. Ils font mine de ne pas savoir que gouverner, c’est prêcher par l’exemple et respecter la parole donnée à tout un peuple. L’éthique a-t-elle encore une place dans la gestion de la chose publique au Togo si un fonctionnaire peut disposer allègrement et impunément de l’argent des citoyens comme s’il s’agissait de son argent à lui ?

La décision de nous servir le même scénario pour la CAN 2017 tel un vieux plat d’ayimolou réchauffé sans s’acquitter des obligations actuelles est l’expression d’une injure du gouvernement à l’intelligence des togolais. Si respect il y avait pour nous ce gouvernement aurait envisagé toute mesure autre que la création de ces comités fantoches à l’affût de nos pauvres poches. Le plus drôle dans tout ceci est de constater que les rares déclarations publiques du gouvernement sur le sujet sont pourtant favorables à la publication des comptes de la CAN 2013. Encore faut-il s’assurer que tous pensent réellement ce qu’ils disent. Le premier ministre actuel en personne avait admis la nécessité de faire les comptes. Tout le monde est d’accord sur le principe mais qui pour se jeter à l’eau ? Personne ne veut s’exposer devant les caméras avec des comptes dont la fiabilité ne serait pas garantie. Où est alors passé le sens de la responsabilité et de la transparence qui doit guider toute fonction publique ?

Faudrait-il rappeler aux membres du gouvernement qui se font tant désirer que la présentation de comptes publics n’est en rien un exploit et que des hommes ont déjà été capables de l’exercice dans ce pays ? Oui malgré l’opacité ambiante observée dans bien de secteurs certaines personnes ont eu le courage de montrer l’exemple en 2010. Au lendemain de la tragédie qui a frappé en terre angolaise l’équipe nationale certains responsables du comité de gestion en ce temps ont pris l’initiative de publier des comptes. Même si le bilan présenté n’a pas fait l’unanimité les personnes concernées ont eu le mérite de s’acquitter de leur devoir envers les contribuables. Un exemple dont les membres des comités de la CAN 2013 feraient mieux de s’inspirer.

N’en rajoutez pas aux infortunes de ce football

Je ne sais pas pour vous mais être un mordu de foot dans ce pays c’est vivre un supplice, c’est souffrir le martyr. Ma passion pour le football a toujours été mise à rude épreuve par des incongruités et vicissitudes couvrant de honte tout un pays. Puisque personne n’a jamais été comptable de rien beaucoup ont fini par faire du football une mangeoire, un domaine où chacun se sert à volonté sur l’argent du contribuable. Ce sport a fini par tomber dans l’escarcelle de cette fameuse minorité qui selon les dires du chef de L’État « s’accapare les biens du pays ».

 Les matchs ou compétitions à l’étranger sont l’occasion pour certains de voyager en compagnie de leurs copains avec la délégation officielle aux frais du contribuable. Dans un passé récent certains administrateurs de la fédération s’arrogeaient  le droit de prendre des commissions sur les primes des joueurs qu’ils faisaient sélectionner. Même les ressources logistiques ne sont pas exemptes de gaspillage. Longtemps soumis à une gestion désastreuse les maillots de l’équipe nationale ont carrément disparu de la circulation. Ce qui nous a d’ailleurs valu une rupture de contrat par l’équipementier au profit d’un autre fournisseur moins coté. L’équipe a donc dû jouer les éliminatoires toute vêtue de maillots non officiels. Quelle honte pour un pays ayant participé à une coupe du monde.

Bref. Il est clair qu’avant le sale coup du 16 décembre dernier, le football au Togo souffrait déjà assez. Les togolais payent un tribut trop lourd pour le football et n’avaient pas besoin de cette énième tentative de dépouillement.  Autant que je souhaite voir les éperviers voler de victoire en victoire à la CAN, je ne saurai tolérer que les gouvernants piétinent, malmènent le citoyen que je suis en allant de gabegie en gabegie. Il est hors de question d’avaler une pilule amère pour une deuxième fois. Accepter de se faire spolier une fois de plus au nom du football revient à cautionner la médiocrité et  l’opacité dans la gestion des fonds publics.

Il n’y a plus de temps, plus une seule minute à perdre. Finissons en! Pour le respect de la parole donnée à tout un peuple #FaisonsLesComptes au plus vite.

 

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