Eli

Ce qu’un père doit à son fils

Crédit: pixabay.com

Dernier samedi de l’année. Les aiguilles de ma montre au poignet m’indiquaient 11 heures 20 minutes quand je me retrouvais au cimetière municipal. Cette veille de fête était un jour de deuil pour tous les visages serrés qui entouraient le cercueil abritant la dépouille d’un homme. Le père de Yao, ce vieil ami qui portait la douleur d’une perte. Le genre de perte dont on ne peut se remettre. L’homme disparu avait tant marqué les esprits de tout le quartier qu’il m’était difficile d’oublier ses folies le temps d’un enterrement.

Se tenant au milieu de l’assistance, un prêtre aspergeait d’eau bénite le cercueil qui était à ses pieds, tout près d’une fosse creusée pour la circonstance. Statique face au rituel, j’étais pensif. Pas à cause de la mort qui nous attend tous, mais des séquelles que les écarts d’un père pourraient laisser dans la vie de son fils.

Du haut de ses 25 ans, Yao avait déjà perdu son père bien avant qu’il ne quitte ce monde. L’absence de la chaleur paternelle, ça le connaissait depuis que son père a déserté la maison pour ne plus revenir. Tout avait pourtant bien commencé dans la vie de sa famille. Tout allait pour le mieux entre ses deux parents. Ils semblaient s’aimer et couvraient d’affection leur unique fils. Puis, au fil du temps, tout est parti en vrille. Yao devenait spectateur d’incessantes prises de bec. Malgré lui, il était témoin de disputes si bruyantes qu’elles alimentaient des commérages dans le quartier. Dans ma tête subsiste le souvenir de ces nuits où m’arrachait à mon sommeil l’écho de querelles provenant de la maison de Yao, à proximité. Des querelles parfois si vives qu’elles ameutaient certains voisins. Comme des pompiers, ils venaient essayer d’éteindre le feu de la discorde conjugale.

Une situation qui attirait des regards indiscrets. Très vite le père de Yao s’est fait une réputation dans le quartier. Certaines langues lui attribuaient une passion pour les virées nocturnes, un appétit pour les belles rondeurs. D’autres le gratifiaient du titre de « colleur de petites ». Entre les parents, les liens se sont dégradés et ensuite se sont envolés comme de la paille.

Yao sentait son cœur mutilé, déchiré par le feuilleton explosif qu’il subissait. Il reprochait à ses parents d’avoir laissé s’installer en lui un malaise permanent, une certaine torture. Et dire qu’il n’était pas au bout de ses peines. Il a dû recevoir le coup de grâce quand un beau jour, sans divorcer, son père, qui avait dit oui à la monogamie devant le maire, partait vivre le restant de ses jours dans les bras d’une autre femme. Dès lors, les confidences de Yao me donnaient l’impression qu’il avait perdu le minimum de soin et d’attention qu’un homme pourrait attendre de son géniteur. Il paraissait dans une disgrâce qui ne disait pas son nom.

Désormais absent, le père se contentait de lui faire parvenir des subsides pour survivre. Yao avait toutes les difficultés du monde à lui confier ses besoins. Les rares fois où il y parvenait, il les regrettait car il essuyait un refus sec. Il me faisait part de l’indifférence qu’opposait son père aux préoccupations exprimées au sujet de son parcours à l’université. Ayant connu la difficile transition vers le système LMD au campus de Lomé, Yao ne se retrouvait plus dans ses études d’économie. Malgré ses efforts, il venait de boucler quatre années sans valider sa licence. Cela devait lui prendre 3 années. Un cas loin d’être isolé dans sa fac. Il a d’ailleurs songé à la quitter. Sur le sujet, son père prêtait à peine oreille attentive, estimant d’ailleurs qu’il n’était qu’un paresseux.

Il n’y avait plus que sa mère pour partager son vécu quotidien. Elle, qui était contrainte de supporter le gros des charges familiales avec les revenus de son salon de coiffure. C’est aussi par elle que Yao découvrait l’inimaginable : la maladie de son père, le VIH Sida. Par ironie du sort, celui qui avait délaissé un cercle familial créé autour de son fils, a retrouvé ce dernier à son chevet. Yao avait rejoint un homme alité au corps dépéri et endolori. Sous le coup de la dépression, il négligeait son traitement et ne voulait pas d’une vie tributaire d’anti-rétroviraux. Les efforts de Yao pour le motiver à prendre ses médicaments n’y ont rien changé. Impuissant, il l’assista dans une lente agonie jusqu’au jour où se produit l’inévitable. Jusqu’au jour du dernier souffle rendu.

J’ai fixé mes yeux sur le visage larmoyant de Yao, incliné vers cette tombe, abritant désormais la dépouille de son géniteur. J’ai pensé au poids des blessures suscitées par son propre père. Ce poids qu’il était condamné à porter seul. J’aurais souhaité lire dans ses pensées pour saisir l’image qu’il gardait de son père après tout ceci. Était-il pour lui un père irresponsable ? Ou un homme incompris ?  Y répondre ne changerait pas grand-chose car, de toute façon, la vie de Yao poursuit son cours.

A la lumière de son histoire, je comprenais qu’on ne pouvait pas tout se permettre quand on se considère comme parent. Quiconque devient père ou mère n’a pas toujours le droit de faire ce que bon lui semble. On devient responsable de vies dont on est co-auteur : celles de ses enfants. Un parent n’est pas censé négliger l’impact que ses choix pourraient avoir sur la vie de son enfant, car celui qui donne la vie peut aussi bien la briser par ses propres errements.

Hommage à tous les Yao qui se construisent sans avoir eu la chance de compter sur un père ou une mère.


George Weah et le piège de l’état de grâce

G. Weah pendant sa campagne
Credit photo: AFP/ISSOUF SANOGO

Il y a quelques semaines, la majorité des libériens marquaient l’histoire de façon inédite. Par leur vote ils attribuaient pour la première fois le costume de Chef d’Etat à un ancien footballeur et non des moindres. Au moment d’enfiler ce costume le 22 janvier à la cérémonie d’investiture, l’heureux élu devra éviter de succomber à l’effet flatteur de la gloire car il aura fort à faire.

« Mister George », comme les fans de George Weah aiment à le qualifier, n’aura pas volé le nouveau surnom de « President George ».    

Suite à sa large victoire au second tour de l’élection présidentielle au Libéria, la liesse a été au rendez-vous et un déluge d’hommages s’est emparé de la toile pour le premier Ballon d’Or à devenir chef d’Etat. Si un vent d’état de grâce semble souffler sur lui, George Weah devrait tout de même être conscient que le plus dur commence pour lui.  

Certes l’homme a marqué de son talent le football européen, dérouté les défenses adverses dans des matchs âprement disputés. Mais aujourd’hui le match le plus difficile qu’il s’apprête à livrer n’aura pas lieu sur une pelouse mais à la présidence du Libéria. Dans un pays ruiné par une atroce guerre civile et une corruption endémique, George Weah qui porte d’immenses espoirs sur les épaules devra éviter tout triomphalisme et se retrousser les manches.

Un OVNI de la politique?  

Malgré le large soutien des jeunes majoritaires au Liberia, George Weah ne fait pas pour autant l’unanimité sur sa capacité à diriger le pays. Il devra faire face à une frange hostile de l’opinion publique qui tout au long de la campagne électorale a sous-estimé son leadership politique. Il est couvert de railleries par ses détracteurs qui le traitent d’analphabète et jugent son programme politique ambigu.

On nous insultait. On nous traitait d’analphabètes. On nous accusait d’être stupides parce qu’on soutenait George Weah ,  

a lâché un des partisans du vainqueur suite à l’annonce des résultats.

Ce regard condescendant parait bien injuste au regard des sacrifices consentis par George Weah dans sa reconversion et son engagement politique.  N’ayant pas achevé ses études avant d’entamer sa carrière sportive, l’ancien attaquant s’est bâti tout seul dans l’environnement politique comme un self-made-man. Pour se préparer à la scène politique, il a du prendre le temps de se former sur les bancs de l’université aux Etats unis. Son parcours a fait de lui un acteur politique au profil atypique, loin des cadres de l’élite traditionnelle qui se sont très tôt illustré par de brillantes études dans des universités prestigieuses. Attendu au tournant par ses adversaires, George Weah devra relever le défi de faire déchanter ses détracteurs.

Réussir là où Ellen Johnson-Sirleaf a échoué

C’est bien le principal pari qu’il devra réussir. Au moment de la passation de pouvoirs Ellen Johnson-Sirleaf, l’actuelle présidente, laissera à son successeur un pays dont l’économie est minée par la corruption et qui subit les effets d’un douloureux passé marqué par la guerre et l’épidémie d’Ébola. Sensible aux propos de George Weah contre la corruption, la population attendra de lui qu’il en fasse son cheval de bataille. 

                             

Les jeunes acquis à sa cause attendront sûrement des actions concrètes contre le chômage. Il lui faudra savoir s’entourer des bonnes compétences et mobiliser des fonds importants pour relever ces grands défis.

La nouvelle gouvernance qui s’annonce sera-t-elle à la hauteur des attentes du peuple libérien ? Seul le bilan de « President George » nous en dira davantage.      

Good luck President George!


Esclavage en Libye: la partie visible d’un iceberg

Credit: apr-news.fr

Depuis bien des années je subis le fait de m’informer sur les infortunes des migrants africains dans leur périple vers l’eldorado européen comme une triste routine. La désolation qu’inspire le phénomène est à son comble depuis que circulent des images de migrants en Libye vendus aux enchères comme esclaves.

Les révélations médiatiques sur la traite des migrants en Libye embrasent la toile sous une vague d’indignation. Beaucoup sont ahuris de constater que des êtres humains soient encore aujourd’hui réduits à l’esclavage. Pourtant l’esclavage décrié en Libye n’est qu’une partie d’un mal bien plus important et qui n’a rien de nouveau dans l’époque que nous vivons.

Le marché aux esclaves dans la poudrière libyenne dévoilé par la chaîne américaine CNN a fait sortir de leurs gongs tant de personnalités et d’internautes. Cascade de condamnations par certains dirigeants africains, coups de gueule contre des gouvernants jugés amorphes, appels à la mobilisation lancés par des célébrités. Tout ce déchaînement légitime est de nature à faire croire que c’est la Libye qui remet à la mode la traite d’êtres humains. Faux.

Toute l’attention se porte sur l’esclavage pratiqué en Libye parce que les médias l’ont mis en lumière. Ils ont rendu visible en Libye une pratique qui existe dans d’autres pays et dont les victimes souffrent dans l’anonymat loin des caméras du monde.

La situation en Libye est comme la face visible d’un iceberg que constituent le travail forcé, l’exploitation sexuelle, la traite humaine, bref toutes les formes d’esclavage moderne. L’Union Africaine elle-même qui dit s’insurger contre l’horrible sort des migrants en Libye semble ignorer l’étendue du mal. Elle a manqué l’occasion de s’attaquer au phénomène dans son ensemble.

Des conditions régulières d’immigration ne garantissent pas toujours au migrant à la recherche du mieux-être une condition plus sereine. Elles ne le mettent pas à l’abri de la menace de l’esclavage.

Soucieuses d’améliorer leur condition de vie plusieurs femmes d’Afrique subsaharienne s’étant envolé vers le Liban pour y travailler comme domestiques ont connu la désillusion. Elles se sont retrouvé dans des conditions de travail inhumaines, subissant des maltraitances qui leur ôtent toute dignité et brisent leur rêve d’une vie meilleure. Parmi elles des togolaises revenues au bercail ont brisé le silence sur leur histoire troublante. Malheureusement les témoignages rapportés par la presse locale n’ont pas suffi à faire réagir les autorités compétentes pour des dispositions nécessaires à la protection des ressortissantes subissant le même sort.

Ces souffrances sont aussi celles d’une centaine de femmes mauritaniennes emmenées en 2015 en Arabie saoudite pour des travaux domestiques et qui ont été l’objet de sévices.

J’ai été d’ailleurs surpris de découvrir à la lumière de certaines statistiques que l’Afrique est le continent qui connait le taux le plus élevé d’esclavage moderne au monde, soit un taux de 7%. Inutile de se voiler la face. Ce continent est loin d’en avoir fini avec cette pratique abolie depuis des siècles. Malgré les informations disponibles le sujet n’a jamais été à l’ordre du jour des réunions au sein des instances régionales ou pris en compte dans les actions des instances régionales.

Nous en sommes d’ailleurs à une époque où le travail forcé n’épargne pas les enfants. Dans certaines campagnes au Togo opèrent des réseaux de traite des enfants. En échange de quelques billets de banque certains parents résignés par la pauvreté laissent leurs enfants aux mains de trafiquants qui les conduisent vers les pays voisins où ils sont exploités. Que dire de ces gamins en RDC affairés dans des mines sous un soleil de plomb à extraire du cobalt pour nos smartphones ? Qu’en est-il de tous ces enfants travaillant contre leur gré en Afrique qui se comptent par milliers selon l’Unicef ?

Au-delà du caractère criminel du traitement infligé aux migrants en Libye, il faut croire que c’est avant tout la pauvreté qui rend vulnérables toutes les personnes qui comme les migrants sont victimes d’esclavage moderne en Afrique ou ailleurs. Des actions concrètes contre la traite des personnes s’imposent mais il est encore plus important de s’attaquer aux maux qui la favorisent : la pauvreté et le chômage. Il n’y a rien de plus humiliant pour un être humain que d’avoir du mal à se tailler une place dans sa société et de perdre sa dignité sous d’autres cieux.

Ceux qui quittent leur pays dans l’espoir de construire une vie meilleure pensent le faire par nécessité face à une précarité qui étouffe et enlève tout espoir. Ils ont certes leur rôle à jouer pour trouver le moyen de s’épanouir mais ceux qui les gouvernent sont aussi responsables de leur bien-être social. Chacun a le droit d’avoir une envie d’ailleurs et de chercher son gagne-pain à l’étranger mais on n’est souvent mieux que chez soi. Le meilleur moyen de protéger les personnes contre l’esclavage en Afrique est de combattre le chômage.

Un citoyen capable de subvenir à ses besoins ne saurait trouver un intérêt à traverser le désert au risque de tomber dans les mains de marchands d’esclaves. Plus les jeunes sortiront de la pauvreté, moins vulnérables seraient-ils à ces exploitations et moins de flux migratoires liés aux besoins économiques compterait-on.

 

 


Journée de la femme africaine: mon legs à la jeune fille togolaise

Ce billet est écrit dans le cadre de la campagne digitale de la Journée de la Femme Africaine célébrée tous les  31 juillet. Cette campagne digitale Initiée par Grâce Bailhache, a cette année pour thème « la transmission » qui est au cœur de cet article.  Je me propose alors de vous faire découvrir ici ce que je souhaite transmettre à la jeune fille togolaise. 

De mes parents j’ai toujours eu droit au même traitement que mes sœurs. Alors que nous étions petits, il n’était pas rare que nous partagions les mêmes taches à la maison. Quand il fallait donner un coup de main à papa en plein bricolage, ou faire la lessive sous la supervision de maman, j’avais intérêt à ne pas jouer au récalcitrant. La moindre bouderie m’exposait à une bonne fessée ou à l’interdiction de rejoindre les amis pour une partie de foot. Mon père avait l’habitude de marteler à ses enfants qu’ils étaient égaux, qu’il n’y avait pour un garçon aucune honte à faire la cuisine autant qu’une fille voire mieux qu’elle. Une éducation qui m’a aidé à comprendre plus tard que la place de l’homme dans une société est aussi celle de la femme.

Pourtant elle n’a pas suffi à me faire comprendre le vécu d’une femme dans une société comme la mienne.

Dans le cocon familial où j’ai grandi, dans la bulle urbaine de Lomé où les discours nous sont servis à volonté sur l’égalité des droits et l’émancipation de la femme, je me suis permis un regard biaisé sur le genre au Togo. L’éducation des milieux urbains à coup de campagnes de sensibilisation a occulté dans mon imaginaire les réalités des jeunes filles de certaines localités. J’étais incapable de saisir l’ampleur de ce que pouvait vivre une fille là où ses droits sont ignorés, là où les parents ne connaissent pas d’autres règles que des coutumes aussi nuisibles soient-elles.

J’ai fini par ouvrir les yeux sur ces dures réalités, à la faveur d’un travail humanitaire dans un village. J’ai fini par découvrir qu’il existe encore, malgré toute l’évolution juridique, des lieux où les jeunes filles n’ont absolument droit à rien. Elles ne peuvent aspirer comme les jeunes garçons à mener jusqu’au bout leurs études.

Pour une fille le cours primaire ou le collège, c’est largement suffisant

C’est ce que pensent certains parents qui promettent la main de leur enfant à un homme qui pourrait avoir l’âge de son père ou de son grand-père. Ces filles n’ont pas le temps de rêver du métier de leur choix parce que leurs parents frappés par la misère, préfèrent les livrer comme une main d’œuvre à des inconnus qui se feront le plaisir de les exploiter et d’abuser d’elles pour de vils intérêts. Et quand elles sont violées, elles n’ont pas droit à la justice parce que leurs proches les réduisent au silence au nom de l’honneur de la famille.

Un petit détour à Sokodé  ou au village d’Avoutokpa vous fera découvrir des filles qui ont connu une histoire douloureuse et qui ont la chance de se retrouver dans un centre d’accueil où elles apprennent à préparer un nouveau départ.

Aujourd’hui j’aimerais solliciter un regard avisé de la jeune fille sur le contraste de la condition féminine. Un contraste dont la fin dépend en partie d’elle car elle a sa partition à jouer pour l’évolution des mentalités dans toute la société togolaise. J’aimerais lui transmettre le gout du travail acharné pour se tailler une place dans sa communauté. J’aimerais lui léguer mon dégoût de la facilité et des raccourcis, ces options à court terme qui n’aboutissent qu’à de faibles résultats.

Dans ces milieux qui lui sont hostiles, ces localités où la jeune fille ne se voit pas reconnaître les mêmes chances et les mêmes droits qu’ailleurs, l’éducation demeure une des principales clés pour faire sauter les verrous culturels qui entravent sa liberté. Il lui faut croire aux vertus de l’éducation. Face aux restrictions qu’elle subit, elle a besoin d’une bonne dose de courage pour continuer à s’instruire, à se construire à l’école. Fortes de toutes ses connaissances elle pourrait éclairer sa communauté sur le respect que cette dernière doit à ses droits. Elle pourrait faire déchanter tous ceux qui pensent à tort que l’égalité de chances est un leurre.

Dans un monde en plein mouvement où de plus en plus de femmes vivent librement de leur passion et s’épanouissent par leur talent, la jeune fille ne manque pas de modèles qui puissent servir de repères pour le parcours d’une vie. Elle pourra y puiser la force nécessaire pour relever ses défis. Bien des années avant nous, l’illustre historien Joseph Ki-Zerbo  disait son admiration pour le leadership féminin en ces termes :

« Les femmes sont souvent des leaders exceptionnels qui dépassent de loin les hommes. Elles sont en général plus fidèles dans leur engagement »

Bien entendu, il ne s’agit pas là d’une parole d’évangile.  A chacun alors de se faire une opinion.

Au Togo comme ailleurs en Afrique, toute la masse de jeunes est vue par beaucoup comme un potentiel pour l’avenir. Mais  peut-on en dire autant des jeunes filles si ces dernières sont encore confrontées à de multiples violations ?

A toutes celles qui sont brimées, qui subissent tant de préjudices, je voudrais transmettre juste un peu d’audace pour braver cette peur dans laquelle elles sont embrigadées. J’aurais aimé les voir s’attacher à leurs passions, à leurs rêves quel qu’en soit le prix car leur avenir en dépend. Cet avenir est aussi celui de toute une société. Laisser des filles à elles-mêmes c’est compromettre l’avenir d’une société où elles sont appelées à devenir la prochaine génération de femmes.

Nul n’a le droit de voler à une fille son avenir. Sa vie lui appartient et nul n’a le droit de la briser.

 

 

 


Au Togo, les nouveaux escrocs sont de faux recruteurs

 

Au Togo, les nouveaux escrocs sont de faux recruteurs. En cette fête du travail, du premier mai, il y aura du boucan à Lomé ce matin. On le sait bien. Le premier mai à la togolaise sera fêté comme il se doit. En tout cas les patrons ont intérêt hein ! Parce que les employés peuvent tout pardonner à leur chef sauf lésiner sur les moyens en ce jour. C’est de bonne guerre.

Comment passer à côté de la seule occasion pour tout un personnel de décompresser, et même pour certains de danser jusqu’à fatiguer, boire jusqu’à la lie ? Figurez-vous que moi je me suis toujours senti attristé du fait qu’on ne s’intéresse qu’aux travailleurs dans cette ambiance festive.
Et les chômeurs dans tout ça? Ils sont la proie de faux recruteurs, ces nouveaux escrocs. Ce sont pourtant eux les oubliés du droit au travail célébré le 1er mai. Eh bien ! La charité ordonnée commence par ce blog, dont je braque aujourd’hui les projecteurs sur le vécu d’un alter ego, qui dans les méandres du chômage a connu la cruauté de l’escroquerie.

Credit image: rmsnews.com

L’exemple du jeune diplômé Constant

Fraîchement sorti de ses brillantes études en comptabilité à l’université de Lomé, Constant s’est lancé avec beaucoup d’espoir dans la chasse à l’emploi. Mais à force de multiplier sans résultat les tentatives le gars a commencé à s’essouffler. Il lui a fallu des revers successifs dans ses démarches pour se persuader que dans ce pays il n’y avait pas de place pour l’emploi de ses rêves.

Peut-être lui fallait-il en dernier recours répondre aux sirènes de l’entreprenariat dont les atouts sont claironnés depuis un moment à la jeunesse désœuvrée. A voir la panoplie de jeunes diplômés qui mordent la poussière comme lui et échouent dans les bureaux à se faire recruter il n’y croyait vraiment plus, jusqu’au jour où il tombe sur une information en pleine période pascale. Religieux de la première heure, mon ami était sûr que la coïncidence de cette nouvelle opportunité avec le temps de Pâques ne pouvait jamais, au grand jamais, être le fruit d’un hasard.

« Tchalé* viens voir ça ! Mon Dieu ne dort pas hein !», m’avait-il lancé en me montrant l’offre d’emploi reçue sur son Whatsapp. J’avoue qu’à la découverte de l’annonce j’ai salivé. Il s’agissait d’un recrutement à un poste de comptable avec à la clé un salaire plutôt intéressant. Tel un illuminé il se croyait déjà en présence d’un signe, de la réponse à ses incessantes prières, du résultat des nuits passées à égrener son chapelet. Il décide alors de tenter le coup. J’étais moi-même impressionné de voir que l’évolution des choses semblait lui donnait raison.

Un entretien où Constant découvre le pot-aux-roses

Présélectionné, il sera invité à passer un entretien au cours duquel il fait forte impression devant son interlocuteur. En recevant des jours plus tard un message d’invitation du recruteur , il pouvait voir se profiler le bout de tunnel. Cette fois ça y est, c’est dans la poche!

Au moment de retourner dans les locaux du recruteur, Constant était agréablement méconnaissable. Il était sur son 31, tout élégant dans son costume clinquant. Blague à part, le mec était tellement sapé qu’il aurait pu voler la vedette à Brad Pitt ou George Clooney. Désormais certain de tenir enfin ce boulot qui l’avait toujours fui il arrive pile à l’heure et s’installe avec le sourire aux lèvres. Mais la joie n’aura été que de courte durée. Son état d’esprit bascule, son visage souriant se crispe subitement quand le fameux recruteur prend la parole.

Ce qu’il entendait était au-delà de tous les scénarios qu’il aurait pu s’imaginer. Ce que débitait ce monsieur lui sortait par les oreilles. Ce dernier affirme que Constant serait en ballottage avec d’autres candidats et qu’il devrait débourser la somme de 50.000 francs pour suivre une formation destinée à départager les candidats. C’était là une plaisanterie de mauvais gout qui le faisait déchanter.

S’agissait-il d’une offre de formation ou d’une offre d’emploi ? Il ne comprenait plus rien. Jamais à aucun stade du recrutement un employeur digne de ce nom ne pouvait exiger des frais aux candidats. Toute la vérité lui saute alors à la figure. Celui à qui il avait à faire n’était ni plus ni moins qu’un escroc sans vergogne. « C’est quoi ce cirque ? » Pesta-t-il tout furieux d’avoir perdu son temps.

Il prend alors son sac et sort par la porte qu’il claqua derrière lui de toute sa force. Il avait connu bien d’expériences dans son parcours, mais ce qu’il expérimentait-là était bien dur à supporter. Constant venait de prendre un coup de plus, un coup de trop.

De nouveaux escrocs : les faux recruteurs

A vrai dire une telle expérience n’est pas isolée. Le chômage monte en flèche et avec lui  une nouvelle race d’escrocs : les faux recruteurs. Comme le malheur des uns fait le bonheur des autres, l’accroissement des demandes d’emploi semble devenir une « opportunité d’affaires » pour des gens véreux. Dans votre boite mail ou sur Whatsapp vous êtes peut être déjà tombé sur une information faisant état d’une offre d’emploi dans une organisation de renom. Certaines de ces informations cachent une arnaque et il est important de les vérifier dans la mesure du possible avant d’envisager une quelconque candidature.

Les fausses offres d’emploi sont légion et les arnaqueurs redoublent de ruse pour appâter leurs victimes. On se sert du nom d’une grande organisation, on fait miroiter des salaires juteux pour tromper la vigilance de pauvres gens.

Si vous êtes à la recherche d’un emploi, vous êtes alors une proie pour ces pseudo-recruteurs. Ils sont à vos trousses et n’attendent que la moindre imprudence pour vous sauter dessus. Tachons de démêler le vrai du faux, la bonne graine de l’ivraie pour échapper à la cupidité de ces pseudo-employeurs qui n’ont d’yeux que pour nos poches.

Bref, vous aurez compris le mot d’ordre.

                                                                      

Tchalé*= mon gars en langue mina