Bouteflika, le révélateur d’une maladie politique en Afrique

17 avril 2014

Bouteflika, le révélateur d’une maladie politique en Afrique

Abdelaziz Bouteflika.
Abdelaziz Bouteflika crédit: Farouk Batiche/AFP

Les Algériens sont appelés à élire leur prochain président ce 17 avril 2014 dans un scrutin au scénario prévisible. L’élection présidentielle en Algérie à mon avis risque de prendre l’allure d’une formalité dès lors qu’au vu des forces en présence on peut déjà se permettre d’imaginer celui qui sortira victorieux de cette course. Peut-être que d’aucuns me reprocheraient de vouloir anticiper sur l’épilogue de cette élection, mais j’estime qu’il faudrait un miracle pour faire échec au vieux Bouteflika, au pouvoir depuis 1999.

En effet, ce dernier ne semble pas près de quitter les affaires à la tête du pays, et ce n’est pas la maladie qui lui fera changer d’avis. En apprenant la candidature du président sortant, cet homme qui cache mal des signes de méforme, j’ai d’abord cru à une blague avant d’être forcé d’avaler la couleuvre. En tout cas il peut compter sur une police plutôt douée quand il s’agit d’étouffer le ras-le-bol de ces Algériens qui élèvent leur voix pour tenter de le ramener à la raison. Je me sens intrigué par cet entêtement d’Abdel Aziz Bouteflika. Comment comprendre qu’un homme affaibli par l’usure du temps et la maladie s’obstine à se cramponner au pouvoir ? Lorsqu’on n’a plus les aptitudes nécessaires pour diriger comme il se doit, le bon sens voudrait que l’on se retire sagement pour céder la place à des personnes plus dynamiques. Malheureusement, il me semble que ce bon sens est absent des sphères du pouvoir politique en Afrique.

 Rien de nouveau

En réalité, le cas algérien est loin d’être isolé sur le continent. Il ne fait qu’illustrer une maladie bien plus partagée que celle dont souffre Bouteflika. Il s’agit de la boulimie du pouvoir qui perdure depuis plusieurs années. Comme le président algérien, bon nombre de ses homologues ont tenté et tentent toujours de prolonger les délices du pouvoir malgré des obstacles liés à leur état de santé ou à la Constitution. Ils n’osent pas imaginer une vie en dehors de la fonction présidentielle. Il n’y a que la mort qui puisse marquer la fin de leur mandat. Plutôt mourir que de quitter le pouvoir ! C’est une philosophie qui se traduit bien dans les faits puisqu’on a vu tant de personnes diriger leur pays jusqu’à la mort.

Ces pays africains où l’alternance se déroule sereinement dans le respect des règles du jeu démocratique sont encore rares. Aujourd’hui, beaucoup de dirigeants conservent le pouvoir par tous les moyens. En promenant le regard sur la carte du continent on remarque qu’il y a de nombreux chefs d’Etat qui dirigent leur pays depuis des décennies et qui à chaque fin de mandat cherchent à rempiler. Permettez que je me prive d’en dresser ici la liste, ce serait trop fastidieux ! A titre d’exemple, le Zimbabwe depuis son indépendance est toujours gouverné depuis 1987 par Robert Mugabe qui n’a rien à envier à Bouteflika en termes de longévité.

 Une maladie politique aux conséquences néfastes

Lorsque l’exercice du pouvoir est monopolisé, ce sont les citoyens qui en subissent les dures conséquences. Cette soif de pouvoir est souvent porteuse de crises dans les pays à partir du moment où le chef se permet de contourner les règles du jeu démocratique prévues par la Constitution pour assouvir ses intérêts. Ainsi les élections se déroulent dans des conditions irrégulières et débouchent sur des conflits qui parfois coûtent la vie à des innocents.Le Togo en 2005 et le Kenya en 2007  en ont fait l’amère expérience.

La phobie de l’alternance pousse certains à envisager des réformes constitutionnelles pour sauter le verrou de la limitation de mandats, ce qui crée des tensions sociopolitiques comme au Burkina Faso où la société se mobilise contre des velléités de passage en force constitutionnel. On se souvient encore des frasques de Mamadou Tandja au Niger qui ont conduit à un coup d’Etat.

En clair, les étourderies de Bouteflika ne font que confirmer une tendance générale dans la gouvernance du continent. Parce que la boulimie du pouvoir est vectrice d’instabilité, il faudra y mettre fin au nom de la paix sociale.            

Partagez

Commentaires

DEBELLAHI
Répondre

Malheureusement, cette boulimie du pouvoir, est une maladie contagieuse, héréditaire et incurable.

Eli
Répondre

Maladie vraiment incurable comme tu le dis debellahi...à moins d'en trouver le remède!
Merci pour ton regard sur cet article.

De Rocher Chembessi
Répondre

Mon frère,

C'est écœurant, triste et insultant ce que nous subissons de la méprisante gouvernance de l'Afrique. Mais je pense savoir pourquoi les choses ont été ainsi faites en Algérie....

Eli
Répondre

De Rocher, nous méritons meilleur sort en matière de gouvernance.On ne le dira jamais assez.On aurait bien aimé partager ta petite idée sur ce qui explique la situation en Algérie.Toutefois merci de passer par ici, a bientot!